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ÉDITO | avril 2025

ÉDITO | Lettre Paysanne - avril 2025 

Miser sur l'autonomie face aux tensions géopolitiques

Lors de notre Congrès 2025, le Shift Project rappelait que le secteur agricole français, et en particulier son modèle dominant, dépend largement d'importations pour deux intrants essentiels pour de nombreuses fermes : les engrais minéraux, dont 75 % sont importés, et le soja, dont les deux tiers sont importés. Ce manque d'autonomie et ces dépendances fragilisent notre souveraineté alimentaire, ce qui est particulièrement préoccupant dans le contexte actuel de tensions géopolitiques (voir article page 12 de la Lettre Paysanne).


Des tensions géopolitiques, nous en vivons en ce moment, en particulier avec les USA de Donald Trump. Face à l’augmentation des droits de douane sur l’acier et l’aluminium lancée par le président américain, la commission européenne va répliquer en imposant des droits des douanes sur les importations américaines. Parmi les produits ciblés, on retrouve notamment le soja.


Un produit pour lequel nous dépendons des importations. En effet, l’Europe importe près de 90 % du soja qu’elle consomme, principalement pour l’alimentation animale. Et les USA sont, après le Brésil, notre principal fournisseur.


Cette dépendance aux importations de soja et, en particulier de soja américain, est historique. Les importations de graines oléagineuses et de tourteaux de l'UE sont exemptes de taxes depuis le cycle Dillon du GATT en 1962. Cette situation a poussé à l’utilisation massive de soja bon marché dans les élevages tout en empêchant le développement de cultures protéagineuses dans l’UE. Une situation de dépendance qui rend les fermes et les filières vulnérables aux comportements de nos partenaires.


L’annonce récente d’augmenter les droits de douanes sur le soja américain en est le parfait exemple

Pour la FUGEA, cet épisode souligne une fois de plus la fragilité du système agroalimentaire mondialisé et dérégulé. Cela nous rappelle que nos membres et notre syndicat ont fait le bon choix en défendant coûte que coûte l’autonomie des fermes. En élevage, cette autonomie, que nous défendons, se traduit par une valorisation de l’herbe et des fourrages locaux plutôt que des

aliments importés. Outre les externalités positives sur l’environnement et la qualité des produits, ces choix renforcent donc aussi notre résilience : en réduisant notre dépendance aux intrants importés, nous gagnons en stabilité et en maîtrise de coûts.


Nous continuerons à plaider pour des politiques soutenant les modes de production plus autonomes. Mais il est urgent de revoir le fonctionnement du secteur agricole et alimentaire dans son ensemble ! Ces tensions géopolitiques n'impacteront pas que le prix du soja. Elles risquent aussi d’impacter le prix de nos productions, en particulier celles dépendant des marchés mondiaux.

Cette situation n’est pas tenable dans un monde aussi instable. La régulation des marchés, la relocalisation des filières de production et notre souveraineté alimentaire doivent devenir des priorités politiques.

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ÉDITO | mars 2025