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Note politique FUGEA – Concilier développement des énergies renouvelables et agriculture durable

Propositions de la FUGEA pour renforcer notre souveraineté énergétique sans impacter notre souveraineté alimentaire.

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Introduction

 

Le dérèglement climatique n’est plus une hypothèse. Sécheresses, inondations, mini-tornades, … les évènements de ces dernières années n’ont fait que confirmer que l’emballement de notre planète a déjà bel et bien commencé. Les agriculteurs, travailleurs du vivant, sont les premiers témoins de ces changements. Mais aussi les premières victimes… Ce qui renforce leur volonté d’agir, avec le reste de la société, pour atténuer la crise climatique et s’y adapter.

Dans ce contexte, la sortie des énergies fossiles est une nécessité, dont l’urgence est exacerbée par les tensions géopolitiques actuelles et les risques de pénuries de gaz. Cette sortie devra aller de pair avec une plus grande sobriété énergétique et le développement des énergies renouvelables.

Les agriculteurs de la FUGEA s’inscrivent pleinement dans cette volonté de transition énergétique. Chaque secteur devra être mobilisé et nous voulons en être acteur.

Néanmoins, cette transition ne peut se faire au détriment du monde agricole. Et pourtant, nous constatons avec dépit que le développement de certaines énergies renouvelables se fait sans cadre politique clair et dans un contexte de crise foncière (voir encadré page suivante). Trop de projets ont ainsi des effets négatifs sur le secteur agricole, en particulier par l’exacerbation des problèmes déjà criants d’accès aux terres agricoles, entrant en compétition avec la production alimentaire et industrialisant certains modes de productions, en opposition à une agriculture paysanne et durable.

Ce document est le fruit d’un travail de réflexion entre les agricultrices et agriculteurs de la FUGEA. Il se base notamment sur des témoignages d’expériences vécues sur le terrain. Via cette analyse, la FUGEA souhaite alarmer sur les menaces actuelles et futures pour le secteur agricole d’un développement non réfléchi et non encadré des énergies renouvelables.

Ces constats de terrains et propositions de mesures sont détaillées pour cinq secteurs de production d’énergie renouvelables liées au monde agricole : la biométhanisation, les agrocarburants, l’agrivoltaïsme, le photovoltaïque sur toitures et l’éolien.

Cette note est principalement destinée à nos décideurs politiques, qui ont la plupart des cartes en main pour mettre en place les solutions proposées. Mais elle s’adresse également à tout acteur de la société (promoteurs de projet, communes, citoyens, associations environnementales) qui souhaite mieux comprendre les effets du développement du renouvelable sur le milieu agricole.

Nous sommes convaincus qu’il est possible de concilier souveraineté énergétique et alimentaire.

 

Philippe Duvivier, Président de la FUGEA


Accès à la terre : un enjeu critique en Wallonie dont il faut tenir compte dans la régulation des énergies renouvelables 

 

Tout au long de cette note, l’accès pérenne des agriculteurs et agricultrices aux terres agricoles est au cœur des préoccupations. Aujourd’hui en Wallonie, l’accès à la terre, c’est-à-dire la possibilité pour un agriculteur d’accéder à des surfaces pour son activité agricole, est une problématique majeure. L’achat de parcelles agricoles est devenu quasi impossible pour de nombreuses fermes, le prix étant parmi le plus élevé d’Europe. A défaut d’acheter des terres, les agriculteurs et agricultrices misent donc sur la location de parcelles pour accéder au foncier (62% des terres sont cultivées de cette façon par des agriculteurs). L’enjeu en cas de location est alors d’obtenir un contrat pérenne sur plusieurs années, ce qui n’est possible que via le bail à ferme. Malheureusement, de moins en moins propriétaires acceptent cette solution, par crainte d’être limités dans leur liberté et dans leur rentabilité.

Pourtant, ce manque d’accès sécurisé à la terre est un frein immense pour la pérennité des fermes et l’installation de jeunes agriculteurs. Or, le renouvellement des générations est un défi de taille : en Wallonie, seule 1 ferme sur 5 a un repreneur assuré et l'âge moyen des agriculteurs est de 55 ans.

Les facteurs de pression expliquant cette crise du foncier sont multiples et reliés les uns aux autres : compétition entre les usages alimentaires et non-alimentaires, spéculation financière, investisseurs externes, agrandissement des fermes, etc. Le développement de certaines énergies renouvelables n’est pas en reste et renforce souvent ces mécanismes, notamment la pression entre les différents usages. 

Ces dérives sont permises par l’absence de politique foncière globale en Wallonie. La FUGEA plaide pour l’adoption d’une vision et d’outils de sécurisation de l’accès à la terre, et ce dans les plus brefs délais.

1. LA BIOMÉTHANISATION

1.1. Contexte

La biométhanisation est un processus de fermentation anaérobie d’intrants organiques divers. Ce processus abouti à la production de gaz (qui peut ensuite être transformé en électricité et en chaleur) et d’un résidu de décomposition appelé digestat, qui peut être utilisé comme fertilisant agricole.

En 2020, la Wallonie comptait 54 unités de biométhanisation dont 33 sites de méthanisation agricole, c’est-à-dire des unités traitant à la fois des intrants directement issus de l’agriculture (cultures, coproduits de culture, effluents d’élevage, …) ainsi que des déchets agro-alimentaires ou des déchets verts (Valbiom, 2021).

Pour s’approvisionner en intrants, la majorité des exploitants de biométhanisation établissent des contrats d’achat, notamment pour du maïs. Deux modalités de contrats s’observent sur le terrain : soit un contrat d’achat de maïs « sur pied » où le biométhaniseur achète et récolte une parcelle de maïs cultivée par un agriculteur, soit un contrat de location de la parcelle pour que le biométhaniseur cultive lui-même.

Les prix des locations sont généralement très élevés : jusqu’à 1350 euros/ha pour la location de parcelle et jusqu’à 3500 euros/ha pour du maïs sur pied.

A titre de comparaison, le fermage légal (location d’une parcelle par un agriculteur) correspond environ à 300 euros/ha et l’achat de maïs sur pied pour l’alimentation du bétail se négociait encore environ 1500 euros/ha il y a quelques années.

Parmi les 33 sites de méthanisation, on distingue 15 micro-unités (<50 kW), communément qualifiées de micro-méthanisation agricole (Valbiom, 2021). N’utilisant presque qu’exclusivement du lisier comme intrant, elles ont des fonctionnements et impacts différents des méthanisations agricoles de plus grande puissance.

 

1.2. Enjeux 

  • La concurrence avec la production nourricière

L’enjeu principal de la biométhanisation agricole résulte de la nature de la biomasse utilisée comme intrant ; certaines matières utilisées entrant en compétition avec la production nourricière. 

Le maïs, qui compose 12% des intrants des méthaniseurs en Wallonie, en est l’exemple emblématique. Comme mentionné ci-dessus, les prix d’achat offerts aux agriculteurs par les promoteurs de biométhanisation sont importants. Ces prix élevés incitent de nombreux agriculteurs à cultiver du maïs en substitution de cultures nourricières, moins rentables. Les milliers d’hectares cultivés pour du maïs à des fins énergétiques en Wallonie sont donc autant de terres qui ne sont plus destinées à la production de denrées alimentaires. 
 
 De plus, certains intrants peuvent également entrer en compétition avec l’alimentation animale. C’est bien sûr le cas du maïs mentionné ci-dessus, habituellement utilisé comme fourrage pour le bétail. Mais c’est également le cas des déchets agro-alimentaires utilisés en biométhanisation (57% des intrants utilisés dans des unités de biométhanisation), dont une partie importante est valorisable en alimentation animale (pulpes et radicelles de betterave, déchets de pomme de terre, …).

Ces intrants, achetés à prix forts par des méthaniseurs, deviennent moins abordables pour les éleveurs et ne sont donc plus valorisés en production animale.


  • L’accès à la terre

Les prix de location proposés par plusieurs promoteurs de biométhanisation ont également un impact sur l’accès à la terre. En effet, ces prix, autrement plus élevés que le fermage légal, incitent de nombreux propriétaires terriens à ne plus louer leurs terres à un agriculteur mais à les valoriser en les louant à des promoteurs de de la biométhanisation. Pire, des retours de terrain montrent que certains promoteurs contactent directement des propriétaires terriens pour leur louer les terres à la place des agriculteurs locataires en place.

Alors que l’accès à la terre pour les agriculteurs est déjà incroyablement compliqué en Wallonie, c’est une pression supplémentaire insupportable pour le monde agricole. Si nous n’agissons pas, nos agriculteurs et agricultrices risquent d’être bientôt complètement dépossédés de la terre, leur outil de travail.

 

  • La qualité des sols

Le digestat constitue une source de fertilisant agricole intéressante. Sa valorisation est une solution parmi d’autres pour sortir de la dépendance aux engrais minéraux. Mais l’utilisation de ce digestat  n’est pas sans risque pour la qualité agronomique de nos sols (taux d’humus et absence de pollution). Bien que les études scientifiques à long terme semblent montrer que l’utilisation raisonnée de digestat n’entraine pas de dégradation de la fertilité et du taux de carbone dans les sols, il importe de l’utiliser en bon père de famille. De plus, il convient de maintenir des contrôles stricts du digestat pour réduire les risques de pollution (hydrocarbures, métaux lourds, …).

 

  • La durabilité des pratiques agricoles

En ce qui concerne plus particulièrement les unités de micro-méthanisations, l’utilisation poussée de lisier pose question sur les pratiques agricoles sous-jacentes. En effet, la productivité et donc la rentabilité de ces unités dépend d’un approvisionnement important en lisier le plus frais et méthanogène possible. Selon les installateurs eux-mêmes (Noriap, 2020), plusieurs conditions doivent être remplies pour exploiter au mieux l’installation :

  • Disposer d’un apport de lisier frais. Les exploitations sur caillebotis et fortement robotisée (système de raclage ou robot racleur) sont donc privilégiées ;

  • Offrir aux animaux une ration à fort pouvoir méthanogène, avec une proportion importante de maïs ;

  • Adapter le pâturage et maximiser la période de présence des animaux en bâtiment pour maximiser la production de lisier.

 

1.3. Positions FUGEA

La FUGEA est convaincue qu’il existe des projets de biométhanisation vertueux, conciliant production d’énergie renouvelable et agriculture durable. Certains exemples wallons en témoignent.

​Malheureusement, le manque de cadrage réglementaire rend réelles les dérives mentionnées ci-dessus. Et le déploiement annoncé de la biométhanisation n’en étant qu’à ses débuts en Wallonie, ces dérives risquent fort d’exacerber les effets néfastes si aucune mesure de cadrage n’est prise.

Considérant ces enjeux, la FUGEA met en avant plusieurs solutions pour encadrer ce développement de la biométhanisation.

Premièrement, considérant les enjeux de production nourricière et d’accès au foncier, la FUGEA demande que l’utilisation de cultures dédiées telles que le maïs ne puissent dépasser 15% du tonnage en matière sèche des intrants.

Ce pourcentage, pouvant être lissé sur 3 ans pour permettre plus de souplesse dans la gestion des unités de biométhanisation, devrait également prendre en compte les coproduits agroalimentaires pouvant être utilisés en alimentation animale.

Deuxièmement, considérant le risque possible de contamination des sols par les digestats et le besoin primordial de garantir l’innocuité de ces produits, la FUGEA demande que les contrôles soient renforcés pour les unités de taille importante. En aucun cas, ces contrôles ne devraient être assouplis.

Finalement, concernant la micro-méthanisation, la FUGEA demande qu’aucun incitant public ne soit mis en place pour encourager ce format de méthanisation, car il n’apparait pas compatible avec des systèmes d’élevages résilients et autonomes.

2. LES AGROCARBURANTS

2.1. Contexte

Les agrocarburants désignent les biocarburants produits à partir de matières premières agricoles, également appelé biocarburants de première génération. On y distingue le bioéthanol (principalement produit à partir de blé, de sucre de canne, de maïs ou encore de betteraves) et le biodiesel (principalement produit à partir d’huile de soja, d’huile de palme, d’huile de colza ou encore d’huiles usagées).

En 2020 en Belgique, 91% des matières premières utilisées dans les agrocarburants sont importés, dont 58% hors UE (IEW et al, 2022).


  2.2. Enjeux

  • La concurrence avec la production nourricière

En Wallonie en 2010, 32 % des céréales cultivées étaient destinées à la production d’agrocarburants (Antier et al, 2020). D’après certaines estimations (IEW et al., 2022), « le blé consommé dans le bioéthanol vendu en Belgique en 2020 suffirait à produire 60%  de la quantité de pains consommés annuellement par la population belge ». Ce sont autant de denrées alimentaires qui ne sont plus valorisées pour la production nourricière, qui devrait être la priorité de valorisation de ces matières : food, feed, fuel (alimentation humaine, alimentation animale, énergie).

Tout comme pour la biométhanisation, les milliers d’hectares cultivés pour la production d’agrocarburants sont autant de terres qui ne sont plus valorisées pour la production alimentaire.

 

  • La sécurité alimentaire mondiale

Le prix des agrocarburants, et donc des matières premières agricoles utilisées pour leur fabrication, est fortement corrélé au prix du pétrole. En cas de crise sur le pétrole, l’augmentation de l’intérêt économique des agrocarburants induit une augmentation substantielle de la demande en matières premières. Cette demande accrue a un effet sur les prix des matières premières à l’échelle mondiale. Bien que cette augmentation puisse être économiquement bénéfique pour les agriculteurs, nous ne pouvons cautionner les effets pervers sur la sécurité alimentaire mondiale, principalement pour les populations des pays du Sud. De plus, ces augmentations sont temporaires et augmentent l’instabilité financière des marchés agricoles.

 

2.3. Positions FUGEA

Considérant les enjeux mentionnés ci-dessus, la FUGEA, cosignataire du rapport sur l’« Évaluation de la politique belge d’incorporation d’agrocarburants » (IEW et al., 2022) et de ses conclusions, demande au gouvernement un abandon rapide des soutiens publics aux biocarburants issus de matières premières alimentaires.

La législation européenne autorise désormais les Etats Membres à ne plus utiliser ces agrocarburants. La décision est donc de l’entière responsabilité des gouvernements belges et régionaux.


 

  3. L’AGRIVOLTAÏSME

3.1. Contexte

Selon la définition établie en France, l’agrivoltaïsme consiste en la coexistence, sur une même emprise foncière, d'une production agricole significative et d'une production solaire photovoltaïque tout autant significative.

Cette production solaire sur des terres agricoles peut prendre différentes formes (panneaux au sol, structure en hauteur, panneaux mobiles ou non, panneaux bifaciaux) et s’appliquer à différents contextes (prairies, grandes cultures, arboriculture, …).

Début 2022, le ministre wallon de l’Agriculture a publié une circulaire à destination des administrations pour encadrer la délivrance de permis pour le photovoltaïque au sol. Cette circulaire incite à limiter la délivrance de permis pour des installations agrivoltaïques, sans toutefois les interdire.

 

3.2. Enjeux

  • La concurrence avec la production nourricière

Les installations agrivoltaïques ont inévitablement un impact sur les cultures à proximité. Selon les contextes (cultures, emplacements des panneaux et situations météorologiques), les études faites à l’étranger montrent que ces impacts peuvent être positifs ou négatifs sur la production agricole. Il est donc important de bien étudier ces effets, pour que l’agrivoltaïsme n’impacte pas négativement la production agricole wallonne.

 

  • L’accès à la terre

L’arrivée de nouveaux acteurs sur les terres agricoles entraine une pression supplémentaire sur le foncier. Les revenus très élevés des contrats d’agrivoltaïsme sont une opportunité économique unique pour les propriétaires, car il est plus rentable de couvrir ses terres de panneaux photovoltaïque plutôt que de les louer sous bail à ferme à un agriculteur (on parle de revenu au moins dix fois supérieur).

Si le propriétaire terrien est un agriculteur en fin de carrière, les contrats agrivoltaïques sont également un incitant à garder les terres pour bénéficier d’une rente foncière (phénomène de rétention foncière). Les prix du foncier augmentent fortement vu les nouvelles opportunités financières. Cette augmentation de la valeur pousse d’ailleurs les propriétaires à se détourner du bail à ferme.

 

  • La liberté de culture

Les installations agrivoltaïques limitent les possibilités de productions. Par exemple, une prairie recouverte de panneaux ne peut plus être convertie en culture. De plus, les opérations de gestion de cette prairie (fauche, sur-semis, épandage de fumier,…) sont fortement limitées par la configuration de l’installation agrivoltaïque. Mises en place pour plusieurs dizaines d’années, ces installations agrivoltaïques restreignent donc très fortement les changements de pratiques et la liberté de culture de l’agriculteur. 


3.3. Positions FUGEA

Étant donnés les enjeux mentionnés ci-dessus, et particulièrement le risque d’exacerber la pression déjà importante sur le foncier agricole et l’accès à la terre, la FUGEA est opposée à toutes formes d’agrivoltaïsme sur les terres agricoles.

 

Nous demandons donc au ministre compétent d’aller plus loin que la circulaire et de légiférer pour interdire la délivrance de permis d’installations agrivoltaïques sur terres agricoles.

Les installations solaires devraient en priorité être déployées sur les nombreuses zones déjà artificialisées (toitures, parkings, friches, toitures, zonings, bords d’autoroute, …).


4. LE PHOTOVOLTAÏQUE SUR TOITURES AGRICOLES

4.1. Contexte

Les bâtiments agricoles offrent une grande surface disponible pour l’installation de panneaux photovoltaïques. De plus, ces installations peuvent permettre d’augmenter l’autonomie énergétique de la ferme.

Actuellement, ces surfaces sont sous-valorisées. Le cabinet du Ministre Henry souhaite encourager le déploiement du photovoltaïque sur les bâtiments agricoles. Pour cela, il envisage de promotionner le mécanisme du tiers-investisseur : l’agriculteur loue ses toitures à des producteurs d’énergie qui revendent l’intégralité de l’électricité produite sur le réseau.

Si l’agriculteur souhaite investir par lui-même, il existe des différences importantes de mécanisme de rentabilité selon que l’installation supérieure ou inférieure à 10 KVA (puissance de l’onduleur).

Pour une installation inférieure à 10 kVA, l’agriculteur bénéficie comme tout citoyen du « compteur qui tourne à l’envers » : le surplus d’électricité non-autoconsommé est réinjecté sur le réseau et déduit des factures d’électricité. Ce régime ne s’applique que pour les installations mises en service avant le 1er janvier 2024.

Pour les installations supérieures à 10 kVA, l’électricité produite en surplus n’est pas déduite de la facture mais est revendue sur le réseau. Les démarches pour ce genre d’installation sont plus complexes, notamment car il est judicieux d’obtenir des certificats verts pour garantir la rentabilité de l’installation et qu’il faut demander des autorisations au distributeur d’énergie pour la mise sur le réseau de l’excédent de production.

Au niveau des aides, les installations photovoltaïques sont éligibles aux aides agricoles à l’investissement (ADISA), à condition qu’il n’y ait pas de revente d’électricité. Par conséquent, ces aides s’appliquent généralement aux installations inférieures à 10 kVA.

 

4.2. Enjeux

Le mécanisme du tiers-investisseur a l’avantage que les investissements et les démarches administratives sont supportés par l’entreprise de production d’énergie. Mais cette solution n’est pourtant pas la plus avantageuse pour l’agriculteur. Premièrement parce que l’électricité produite est intégralement revendue sur le réseau et ne peut pas être autoconsommée par la ferme. Les factures d’électricité ne sont donc nullement diminuées.


 Deuxièmement car cette solution est peu intéressante économiquement. Bien que la location de la toiture offre un revenu complémentaire, l’intérêt économique est nettement plus faible que via les autres régimes.

 

L’investissement par l’agriculteur est nettement plus rentable. Actuellement, le retour sur investissement est généralement de 3 à 7 ans. Les installations inférieures à 10 kVA sont particulièrement recommandées pour les fermes avec des besoins modérés en électricité (moins de 40 000 kWh/an) car elles permettent de couvrir une partie conséquente des besoins électriques, voire la totalité pour les fermes à plus faibles consommations.

Pour encourager les agriculteurs à investir dans le photovoltaïque sur toitures, il faut lever les 3 freins principaux, à savoir :

  • Le besoin de trésorerie pour l’investissement

  • Le besoin d’accompagnement pour les démarches administratives

  • Le besoin de conseils technico-économiques neutres pour le choix des installations.


4.3. Positions FUGEA

La FUGEA ne souhaite pas la mise en place d’un soutien politique privilégié pour le mécanisme du tiers-investisseur car ce dernier ne permet pas d’augmenter l’autonomie énergétique des exploitations et qu’il constitue la solution la moins rentable pour l’agriculteur.

Pour favoriser les investissements par les agriculteurs eux-mêmes, la FUGEA demande la mise en place d’un facilitateur neutre pour répondre aux questions des agriculteurs, les accompagner dans leurs démarches administratives (notamment de recherches de prêts publics) et leur offrir un conseil neutre sur les technologies proposées par les installateurs photovoltaïques.


5.  L’ÉOLIEN

5.1  Contexte

Nous considérons ici le grand éolien terrestre, c’est-à-dire les unités dont la puissance est supérieure au mégawatt. Début 2022, la Wallonie comptait 492 turbines éoliennes. La surface occupée par ces éoliennes est négligeable.

 

5.2  Enjeux

Le principal enjeu concerne les effets potentiels des champs électromagnétiques et des infrasons des pâles d’éoliennes sur la santé des animaux. Plusieurs éleveurs, notamment en France, rapportent des problèmes sanitaires dans leur troupeau suite à l’installation d’éoliennes à proximité de leurs étables. Bien que les liens entre l’installation des éoliennes et les problèmes sanitaires du troupeau ne soient jamais clairement établis, aucune autre explication crédible n’est généralement apportée, laissant planer le doute sur l’innocuité des éoliennes.

 

5.3  Positions FUGEA

En vertu du principe de précaution, la FUGEA demande que des distances de recul soient imposées entre les mâts éoliens et les stabulations hébergeant du bétail, pour garantir le bien-être animal. D’une manière générale, nous demandons que ces distances de recul soient obligatoires pour toutes installations pouvant produire des champs électromagnétiques ou des ondes (antenne GSM, lignes haute-tension, éoliennes,…).

 


 

  Conclusion

Les nombreux retours de terrain mis en avant dans ce document montrent clairement qu’un développement non encadré des énergies renouvelables conduit à des dérives pour le secteur agricole.

Les risques principaux concernent l’aggravement de l’accès à la terre pour les agriculteurs (accès déjà très compliqué dans le contexte wallon) et le risque de concurrencer la production alimentaire (et donc notre souveraineté).

La FUGEA a toujours défendu les paysans qui pratiquent une agriculture durable et nourricière. Nous ne pouvons donc pas cautionner ces dérives.

Les solutions que nous proposons, issues d’une large réflexion entre agriculteurs et agricultrices, sont des premières balises qui permettront certainement de fortement limiter les concurrences et effets pervers. Nous appelons les pouvoirs politiques à s’en saisir et à agir rapidement.

Néanmoins, des solutions plus structurelles devront également être mises en place, notamment sur l’accès au foncier. Il sera également nécessaire d’établir une vision de société à long-terme pour faire évoluer les modes de production vers des pratiques moins intensives tout en préservant notre souveraineté alimentaire. Ce qui demandera conserver un maximum de terres agricoles et de les affecter à leur rôle de production nourricière.

Pour la FUGEA, il est tout à fait possible de (ré)concilier développement des énergies renouvelables et agriculture durable et nourricière pour renforcer notre souveraineté énergétique et alimentaire. Et permettre aux paysans et paysannes d’aujourd’hui et de demain de pratiquer sereinement leur métier.