Introduction
La FUGEA est un syndicat agricole composé d’agriculteurs et d’agricultrices qui sont conscients des enjeux sociaux et environnementaux. Nous avons toujours été acteurs et actrices de l’évolution de notre secteur vers
plus de durabilité et avons consentis à des changements importants dans
nos fermes afin de répondre aux défis de notre société. Entre autres
exemples de ces changements, le passage vers des systèmes herbagers plus
autonomes, la transition vers l’agriculture biologique ou l’agriculture
de conservation ou encore vers une agriculture plus autonome, le
développement de la vente en circuits courts,… Tous des changements qui
ont demandé des efforts et des risques importants, que nous avons osé
prendre car nous sommes conscients du besoin de changer et avions
l’espoir d’améliorer nos conditions de vie. Malgré ces efforts,
force est de constater que nos conditions de travail et de rémunération
ainsi que la considération envers notre profession sont loin d’avoir
évolués dans le bon sens.
Pour la FUGEA, ce constat d’échec trouve sa source dans une série de facteurs qui, mis ensemble, forment
un
cocktail explosif. Nous pouvons cibler deux grands acteurs responsables
de ces problèmes : les politiques et l’agro-industrie. L’objectif
de cette conférence de presse est de clarifier pour chaque acteur les
aberrations que nous subissons, quelles sont nos revendications pour
sauver nos fermes et leur transition et quelles seront les actions des
prochains jours.
Politiques
Constats
Nous l’avons dit, nous faisons évoluer nos pratiques sur le terrain mais cette transition doit être soutenue par des politiques fortes et cohérentes. Aujourd’hui, ces dernières font l’inverse.
D’abord, parce que les budgets européens, censés être les principaux soutiens à notre transition, sont en constante diminution.
Ensuite, parce que la mise en œuvre des normes se traduisent par une ultracomplexifiation administrative qui
nous asphyxie : charges administratives intenables, empilement de
règles complexes, baisse de budget, changements continus, communication
tardive, surcontrôles, etc. Même en étant de bonne volonté, il
est impossible de suivre la réglementation. Résultat : nous travaillons
dans l’incertitude et dans le stress perpétuel et ces conditions
freinent aussi bien cette transition que les installations de nos jeunes
en agriculture.
Cette situation, déjà difficile à vivre au quotidien dans les fermes, est d’autant plus inaudible pour le secteur que l’Europe met consciemment notre agriculture en concurrence avec des produits qui ne respectent pas nos normes. La libéralisation de l’agriculture détruit à petit feu nos exploitations ; il est plus que temps de revoir les règles de jeu. Il faut arrêter de nous prendre pour des magiciens : être plus vert avec moins d’argent (baisse des budgets de la PAC) et en étant concurrentiel sur les marchés mondiaux, ce n’est pas possible.
Revendications au niveau des politiques européennes
- Refuser tous les accords de libre-échange mettant en danger notre agriculture et sa transition.
Les instances européennes doivent notamment annuler le processus de signature de l’accord UE-Mercosur, un accord anachronique qui symbolise toutes les incohérences des politiques européennes ; - Interdire l’entrée sur le territoire européen de produits qui ne respectent pas nos normes
(mesures miroirs). Les instances européennes doivent établir un agenda clair sur les mesures-
miroirs pour les mettre en place à court-terme. - Rétablir une régulation des marchés pour garantir des prix justes et stables. Les instances européennes doivent ouvrir des discussions sur ces chapitres de l’Organisation Commune des Marchés (OCM de la PAC).
- Assurer une augmentation des budgets de la PAC pour soutenir nos fermes et leur évolution. Les instances européennes doivent sortir des réductions budgétaires imposées au secteur agricole.
Revendications au niveau des politiques wallonnes
** Simplification administrative
Nous exigeons d’appliquer enfin la promesse de simplification administrative faite dans la déclaration de politique régionale. Les normes incompréhensibles, inapplicables, communiquées tardivement doivent cesser et être revues. Nous demandons notamment de :
- Garantir aucun changement de règles de la PAC, négociée pendant 3 ans et qui s’étale de 2023-2027.
- Aligner et mettre en cohérence les différentes politiques régionales. Très concrètement, les règlesdu PGDA (gestion de l’azote) liées à l’érosion doivent s’aligner sur ce qui a été négocié dans la PAC sur cet enjeu.
- Obliger que les nouvelles normes soient communiquées au minimum une année avant leur mise en application (période de transition) et qu’en aucun cas elles ne soient votées et communiquées dans l’urgence. A ce titre nous demandes des clarifications sur la réglementation liée au clôture de berges.
** Foncier
- Mettre en place une politique réellement efficace pour stopper l’augmentation du prix des terres agricoles, notamment un moratoire sur les ventes de terres publiques, un moratoire sur l’agri-voltaïsme, une évaluation sur la réforme du bail à ferme, etc.
** Offre et demande
- Débloquer des budgets pour assurer la demande en produits bio et de qualité différenciée sans qu’ils soient issus de la poche des agriculteurs et agricultrices engagés dans ces filières. A ce sujet, la nouvelle cotisation bio est un exemple d’aberration qui doit être annulée
Revendications au niveau des politiques fédérales
- Modifier la loi du 28 décembre 2023 portant des dispositions fiscales diverses pour supprimer
l’obligation pour les agriculteurs de joindre en annexe les informations liées aux parcelles louées ou en propriété
Agro-industrie et grande distribution
Constats
Les filières agro-industrielles sont les premiers acheteurs de nos produits. Réfractaires au changement lorsque
nous avons été pionniers dans l’évolution de nos pratiques, ces acteurs
ont changé leur fusil d’épaule depuis quelques années pour récupérer
l’image positive liée à notre transition. Ils nous “encouragent”
maintenant à continuer dans cette direction et à multiplier les efforts
de transition dans nos fermes.
Malgré nos efforts, une chose n’a pourtant pas changé : les prix d’achats de nos productions !
Comment peut-on nous demander de faire évoluer nos pratiques sans nous
apporter le retour financier nécessaire pour soutenir cette transition?
Ce constat est d’autant plus criant que nous avons connu, les deux
années précédentes, une inflation sans précédent. Cette
inflation s’est matérialisée dans les prix de vente aux consommateurs
mais, du côté des producteurs, le prix d’achat de nos productions est
resté identique. Alors que nos charges ont quant à elles
explosées. Mais où donc est passée la marge ? La réponse nous semble
évidente… Et il est insupportable, alors que nous peinons plus que
jamais à garder la tête hors de l’eau, de savoir que nos “partenaires”
dans les filières enregistrent des résultats économiques sans
précédents. Aujourd’hui, les acteurs de l’agro-industrie sont en grande majorité coupables de la situation dans nos fermes.
Revendications pour les acteurs agro-industriels :
- Mettre en place un système de détermination du prix de revient pour interdire l’achat de
matières agricoles sous ce prix (lait, viande, céréales,…). - Obliger à une plus grande transparence sur les marges liées aux achats-vente de productions
agricoles. - Sortir des initiatives de greenwashing basé sur les crédits carbones ou autres poudre de
perlimpinpin qui nous poussent à l’agrandissement et l’intensification des pratiques.
Les citoyens et citoyennes
Base de notre société, ils sont le moteur des changements opérés par le secteur. Au fil du temps, ils nous ont légitimement poussés à adapter nos modes de production face aux grands défis : le changement climatique, la perte de la biodiversité, la production d’une nourriture locale de qualité, le respect du bien-être animal. Les agriculteurs et agricultrices que nous représentons ont répondu en grande partie à leurs attentes.
En témoignent la conversion de nombreuses fermes vers l’agriculture
biologique, le développement de productions en circuits courts,
l’évolution vers des systèmes d’élevage davantage basés sur l’herbe,
moins dépendants de soja importé et plus respectueux de nos animaux,…
Pendant un temps, les citoyens et citoyennes nous ont soutenus, par
leurs actes d’achat. Mais depuis plusieurs années, c’est la
douche froide : diminution des achats de produits bio et de qualité
différenciée, disparation des clients de nos points de vente locaux,
agri-bashing envers les éleveurs,… Citoyens et citoyennes, nous avons besoin de vous pour continuer la transition dans nos fermes. Sans vous, nous sommes livrés au dictat de l’agro-industrie. Manger est politique et vos choix de consommation conditionnent notre avenir. Citoyens et citoyennes, vous convions à nos actions !
Nos actions
Les actions FUGEA auront pour cible : les politiques européennes, les politiques wallonnes, l’agroindustrie et la grande distribution.
Une
première action surprise aura lieu ce midi à Bruxelles. Elle dénonce la
dérèglementation sur les nouveaux OGM et ses impacts sur nos fermes
notamment la perte d’autonomie. Cette nouvelle technique est fortement poussée au bénéfice de l’agro-industrie par certains de nos politiques.
** Pour les politiques wallonnes
La FUGEA se rendra mardi 30 janvier à Namur pour dénoncer l’ultra-complefixation administrative qui étouffe
nos fermes. Une action symbolique sera organisée et nous demanderons
des comptes à l’administration. Nous comptons aussi rencontrer les
Ministres compétents.
** Pour les politiques européennes
La
FUGEA montera à Bruxelles le jeudi 1er février pour dénoncer
l’incohérence des politiques européennes (accords de libre-échanges,
budget PAC, régulation des marchés,…) et exiger des engagements
politiques immédiats. Nous serons soutenus par d’autres syndicats
européens orchestrée avec notre syndicat European Via Campesina
(ECVC). Une conférence de presse sera organisée et des rencontres avec
les décideurs sont prévues.
** Pour l’agro-industrie et la grande distribution
La
FUGEA ciblera un industriel, acheteurs de nos produits, qui depuis trop
longtemps nous paie peu et nous pousse à l’industrialisation.
La FUGEA ciblera un acteur de la grande distribution moteur de la course aux prix bas et de la disparition de nos fermes.
Les détails seront communiqués prochainement.
Contacts
– Philippe Duvivier – Président : 0491 56 33 86
– Hugues Falys – Porte-parole : 0497 61 64 14
– Thomas Huyberechts – Chargé de mission politique : 0499 88 33 93