Élevage et Environnement

L’agriculture serait donc la victime expiatoire de tous les maux de la société ? Pourtant, l’agriculture wallonne a des belles choses à défendre. Sur les émissions carbone, par exemple, notre modèle possède pas mal d’atouts de départ. Nos sols, notre climat, tout concourt à faire de nos élevages ceux qui peuvent entrevoir sereinement le 21ème siècle.

Viande solaire ou viande pétrolière ?

La majorité des chiffres qui incriminent l’élevage proviennent des États-Unis. Car leur modèle est le plus polluant au monde : un maïs subventionné et largement OGM produit avec une intense mécanisation et des engrais azoté issus de la pétrochimie, des parcs d’engraissement en plein désert qui nécessitent des consommations d’eau record et un large charroi d’aliments entrant et de fumiers sortant. Sans parler du soja amené  du sud du continent par ferroutage. Le tout largement dépendant du pétrole.vaches-viandeuses USA

Pourtant, la Wallonie possède une intense tradition de viande solaire. Solaire ?

C’est en effet grâce à la photosynthèse principalement que s’exerce la pousse d’herbe. Comme celles des autres cultures, mais avec moins d’intrants et sans labour ou presque.  Directement assimilable par pâturage, ce fourrage bon marché est évidemment le plus écologique possible, puisque consommé sur place. Son bilan carbone compense en partie les émissions de méthane des ruminants. Mieux : dans toutes les zones d’herbage obligé, la vache transforme en viande ce qui serait un déchet dans un monde végétarien. Et c’est là le principal argument de durabilité de l’élevage : permettre à des animaux de recycler ce qui serait perdu pour l’homme. Et non concurrencer l’alimentation humaine en accaparant les terres de cultures. Cette dernière direction, concrétisée par le tandem maïs-soja, fut décidée durant les années 60 par l’Europe, sous la pression des États-Unis (Kennedy Round). Elle fut confirmée en 1992, lorsque l’Europe accepta de limiter ses cultures d’oléagineux, toujours pour assurer un débouché au soja américain, lors des accords du GATT (Uruguay Round). Et son bilan CO2 est seulement visible aujourd’hui (sans parler de la casse sociale)…

vaches-viandeuse belgique

La viande à l’herbe

Actuellement, la consommation de viande de bœuf s’érode en Belgique. Moins 22% entre 2005 et 2013. Dans le même temps, le porc grappille quelques pourcents et le poulet continue son ascension, tous deux dopés par les plats préparés et les transformations. Et la courbe n’est pas prête de s’inverser, puisque les enquêtes d’opinions chez les jeunes les montrent tout prêt à se passer – un peu plus – de  viande rouge. Preuve que les critiques contre le secteur fonctionnent. Preuve aussi que les producteurs de viande bovine n’ont pas déployé la même inventivité « marketing ». Normal, le secteur est multiple et peine à défendre sa légitimité.
Car en Wallonie comme dans de nombreuses régions de France, nos vaches pâturent l’essentiel de leur vie, tant en production laitière que viandeuse. Et elles sont les seules à pouvoir tirer parti de l’importante biomasse végétale pour produire un aliment aux hautes valeurs nutritionnelles. Fer assimilable, protéines de qualité, acides aminés, vitamines B6 et B12… Mieux encore, la viande et le lait à l’herbe sont des aliments santé, possédant des valeurs Oméga 3 entre 50% et 200% plus élevées que les mêmes produits au maïs

Plus d’autonomie dans nos fermes !

A terme, il restera deux possibilités majeures pour tout éleveur : ou produire pour le marché mondial, en sachant qu’il faudra être « compétitif » (c’est-à-dire produire au même prix qu’un brésilien ou un chinois mais sans convergences des normes). Et en sachant aussi que les pays actuellement importateurs en lait ou viande (les BRIC  et leurs voisins) développent leur capacité d’auto-approvisionnement. Ou s’engager dans une démarche d’excellence et parvenir à le faire reconnaitre. C’est ce volet de la production qui pourra revendiquer le titre d’ « élevage protecteur du climat ». Parce qu’il misera sur l’herbe, la luzerne, les pois, le trèfle et les oléo-protéagineux (colza, lin, chanvre…) pour composer sa ration, avec les céréales comme appoint. Parce qu’il sélectionnera également les animaux non pas en fonction de leur performance absolue, mais en fonction de leur performance sur les fourrages grossiers, les moins chers et les plus capteurs de CO2. Une production durable que devrait récompenser plus activement la prochaine PAC. Et qui pourrait également, à terme, faire la différence sur un marché d’exportation non plus « bas de gamme » mais destiné aux classes aisées des pays émergents.